L'existence de deux photosystèmes : les expériences d'Emerson

Vous venez de découvrir qu'au sein de l'appareil photosynthétique, les pigments sont regroupés en photosystèmes. Il est légitime de s'interroger sur le nombre de types de photosystèmes existants dans une membrane photosynthétique et, le cas échéant, sur le mode relationnel existant entre eux. Le premier à avoir apporté une réponse à ces questions est EMERSON au travers d'une expérience réalisée en 1940 et restée célèbre. Elle porte son nom.

Expérience : L'effet Emerson

D'un point de vue expérimental, le début de l'expérience est simple : EMERSON établit le spectre d'action de la photosynthèse de la microalgue verte Chlorella en mesurant le rendement quantique de l'émission d'oxygène pour chaque longueur d'onde comprise entre 650 nm et 720 nm.

Deux conditions expérimentales sont testées :

  • La première condition expérimentale correspond à la courbe obtenue en trait plein : les algues sont illuminées sur un fond noir successivement par une lumière monochromatique rouge claire à différentes longueurs d'ondes entre 650 nm et 700 nm (gamme des longueurs d'ondes du rouge, un échantillon différent par longueur d'onde)

  • La deuxième condition expérimentale correspond à la courbe obtenue en pointillés : les algues sont illuminées sur un fond d'une lumière rouge à 650 nm à laquelle est superposée une lumière monochromatique à différentes longueurs d'ondes entre 650 nm et 720 nm (couvrant la gamme du rouge clair et du rouge lointain, un échantillon différent par longueur d'onde)

Fig.26 : Spectres d'action du photosystème I et du photosystème II. L'effet Emerson.

Le rendement quantique de l'émission d'oxygène de la microalgue verte Chlorella est mesurée pour chaque longueur d'onde comprise entre 650 nm et 700 nm dans deux environnements lumineux différents à savoir l'obscurité ou une lumière rouge monochromatique non saturante à 650 nm. Lorsque l'expérience est réalisée à l'obscurité, le rendement quantique reste constant jusqu'à 685 nm puis chute progressivement pour ne plus être détectable vers 700 nm (trait plein). Lorsque l'expérience est réalisée dans un environnement lumineux “rouge”, le rendement quantique présente un maximum vers 700 nm et reste élevé jusqu'à 720 nm. Ce résultat ne peut s'expliquer que si l'on considère l'existence d'un second type de photosystème. Ces spectres d'action reflètent l'existence de deux photosystèmes, appelés les photosystèmes I et II. Le centre réactionnel du photosystème II absorbe à 680 nm tandis que celui du photosystème I absorbe à 700 nm. Les deux photosystèmes travaillent en série, ce qui explique l'effet EMERSON. Dans les sections suivantes, nous allons apprendre comment sont structurés les photosystèmes I et II et comment ils sont reliés au travers de la chaîne de transporteurs des électrons.

Questions :

  • Interprétez dans un premier temps les résultats obtenus par la courbe en trait plein : Quel photosystème est impliqué et comment fonctionne-t-il ? Dans quel intervalle de longueur d'ondes est-il le plus actif ?

  • Dans la deuxième condition expérimentale, il est ajouté une lumière rouge continue à 650 nm : en vous référant aux résultats obtenus dans la première condition expérimentale, expliquez ce choix de longueur d'onde continue et quelle conséquence attendue ? Essayez d'interpréter alors l'allure de la courbe obtenue en pointillés : comment expliquer les différences observées avec la courbe en trait plein ?

Réponses :

Conditions expérimentales 1 : courbe en trait plein

Comme nous pouvons l'observer, le rendement de la photosynthèse reste constant jusqu'à 685 nm puis chute progressivement pour ne plus être détectable vers 700 nm. Cette signature correspond au premier type de photosystème.

Conditions expérimentales 2 : courbe en pointillés

Pour essayer de mettre en évidence un second type de photosystème, Emerson décida d'illuminer les algues avec un fond de lumière rouge à la longueur d'onde de 650 nm, s'assurant ainsi qu'une certaine proportion du premier type de photosystème est activé au cours de cette expérience. Cette illumination est qualifiée de non saturante car elle ne permet pas l'excitation de tous les photosystèmes du premier type présents dans l'échantillon. Emerson mesure les variations du rendement quantique de la photosynthèse dans ces nouvelles conditions expérimentales : les échantillons sont illuminés par deux sources de lumière. La première est continue et rouge tandis que l'autre est monochromatique et varie entre 650 et 720 nm. La variation du rendement quantique est représentée par la courbe en trait interrompu dans la figure 26. Le résultat obtenu par EMERSON est inattendu car il présente un maximum vers 700 nm et non plus vers 685 nm. Il reste élevé jusqu'à 720 nm. Ce résultat ne peut s'expliquer que si l'on considère l'existence d'un second type de photosystème. Le centre réactionnel du photosystème II absorbe à 680 nm tandis que celui du photosystème I absorbe à 700 nm. De plus, EMERSON démontre que lorsque les algues sont illuminées par un mélange de lumière rouge et de lumière rouge-lointain, le rendement quantique est supérieur à la somme des rendements obtenus lorsque les algues sont illuminées par une lumière monochromatique rouge ou rouge-lointain. Cet effet est connu sous le nom de l'effet Emerson. Ce résultat ne peut s'expliquer que si l'on admet que les deux photosystèmes travaillent en série. Dans les sections suivantes, nous allons apprendre comment sont structurés les photosystèmes I et II et comment ils sont reliés au travers de la chaîne de transporteurs des électrons.