Un biais d'intentionnalité
Voici comment
Pierre-André Taguieff (2013 : 17)[1] explique le biais d'intentionnalité dans les théories du complot : « « Dans les raisonnements complotistes, on retrouve un mécanisme cognitif général : l'attribution d'intentionnalité. On appelle « biais d'intentionnalité » la tendance qu'ont les individus à voir le comportement des autres comme intentionnel. C'est ainsi qu'une simple maladresse est interprétée comme une conduite agressive, révélatrice de dispositions hostiles. Autrement dit, le biais d'intentionnalité consiste à percevoir l'action d'une volonté ou une décision derrière ce qui est fortuit ou accidentel. Il y a là une confusion non consciente entre les événements physiques et les événements mentaux. En outre, on suppose l'intervention d'un principe d'économie : la reconstruction des enchaînements causaux qui ont abouti à un simple bousculement non intentionnel implique de s'engager dans une analyse interminable. Or, il est moins coûteux d'attribuer le bousculement à un sujet doté d'une volonté »
».
Exemple : A qui profite le crime ?
Le biais d’intentionnalité peut se résumer à la question "à qui profite le crime ?". Pour illustrer ce biais de façon humoristique, on peut citer ici José Artur, un ancien animateur radio qui aimait manier l'humour : « Le sandwich à la mayonnaise est sponsorisé par la Chambre Syndicale de la Teinturerie »
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Cependant, le biais d'intentionnalité est le plus souvent utilisé par des personnes qui se considèrent comme très sérieuses, comme dans l'exemple ci-dessous extrait du site Conspiracywatch, dédié à l'étude de la théorie du complot.
Pour l'eurodéputé frontiste Aymeric Chauprade, le vol MH-17 de la Malaysia Airlines a été abattu [en juin 2014] par « le camp ukraino-américain ».
Voici comment il développe sa thèse : « le drame du vol MH-17 en Ukraine ne profite pas à la Russie mais bien aux gouvernements de Kiev et de Washington (...) A l'évidence, le camp ukraino-américain avait un réel intérêt à abattre cet appareil »
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Établissant un lien entre la bavure du 17 juillet 2014 - attribuée aux forces séparatistes pro-russes - et les attentats du 11-Septembre, le député européen explique que « depuis 2001, régulièrement, un événement dramatique provoque une accélération de l'Histoire qui profite à l'agenda américain. Pourquoi ? La réponse est évidente. Pour sauver les suprématies monétaire et géopolitique américaines et faire ainsi échec au nouveau monde multipolaire »
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Ainsi, il établit une culpabilité dans le crash d'un avion sur la seule base d'une spéculation au sujet des groupes qui en tirent un intérêt. Selon lui, ceux qui trouvent un intérêt à un événement sont aussi ceux qui ont eu l'intention de le commettre.