Cours de Biologie du Développement de Licence

7.4 - Les cellules de la crête neurale

Il s'agit d'une petite population cellulaire située au niveau des bourrelets neuraux. Alors que la plaque neurale forme un épithélium fortement structuré, les cellules de la crête neurale perdent leur structure épithéliale pour devenir mésenchymateuse.

Cet événement se produit au moment de la soudure des bourrelets neuraux. Cette différence peut être mise en évidence par l'expression de gènes différents.

Par exemple : la population de cellules de la crête neurale exprime, au moment du soulèvement des bourrelets neuraux, le gène Slug (Fig.198). Sur cette image, l'expression de Slug est très forte dans la région antérieure du neuroderme là où seront formés les arcs branchiaux.

Figure 198

Le gène Slug est impliqué justement dans la transition épithélio-mésenchymateuse des crêtes neurales. Il s'agit d'un facteur de transcription à 5 doigts de zinc. A l'opposé, la plaque neurale elle-même n'exprime pas Slug mais un gène impliqué dans la formation des épithéliums, le gène Sog (pour Short Gastrulation), gène de la drosophile homologue de chordin chez les vertébrés.

La migration des cellules de la crête neurale utilise les matrices extracellulaires déposées et organisées entre les ébauches d'organe qui se forment à partir de ce stade. On peut montrer par une expérience de greffe de bourrelet neural marqué par un traceur de lignage cellulaire fluorescent, que les cellules de la crête neurale migrent dans des voies riche en fibronectine (Fig.199).

Figure 199

La greffe de bourrelet neural s'effectue au début de la neurulation, avant la soudure des bourrelets neuraux. Au moment de leur soudure, les cellules de la crête neurale marquées quittent l'épithélium du bourrelet neutral et migrent.

Ainsi, in vivo, voyons-nous clairement descendre des trains de cellules latéralement en direction des ébauches branchiales.

En coupe transversale, la révélation de la fibronectine dans les matrices extracellulaires permet de corréler la migration des cellules de la crête neurale à la matrice extracellulaire (Fig.199).

De cette façon on peut en déduire que les cellules de la crête neurale empruntent des voies de migration privilégiées comme ici sous le tube neural et contre la chorde, ou bien sous l'épiderme.

Cette video (Fig.200) permet de prendre conscience de la migration des cellules de la crête neurale chez le xénope. En 1, le greffon marqué par la fluoresceine se sépare en deux populations de cellules dont une migre latéroventralement dans la région des arcs branchiaux (2 à 8). Ce sont les crêtes neurales.

Figure 200

En culture, les cellules de la crête neurale peuvent être déposées sur une surface tapissée de fibronectine. Dans ce cas, les cellules de la crête neurale s'étalent et se dispersent sur le fond de la boîte de Pétri en migrant (Fig.201-video3).

L'expérience a été réalisée chez l'embryon de poulet et consiste à prélever un explant de bourrelet neural que l'on dépose sur le fond d'une boîte de Petri préalablement enduite de fibronectine. Les vues succesives ci-contre montrent que l'explant ne bouge pas.

Par contre, de cet explant, s'échappent de nombreuses cellules. Ce sont les cellules de la crête neurale qui migrent en nappe de façon centrifuge et envahissent le champs en quelques heures.

Leur morphologie est semblable à des cellules fibroblastiques qui se déplacent en émettant des pseudopodes ramifiés exploratoires puis adhésifs.

La puissance migratoire particulièrement forte des cellules de la crête neurale en culture au cours de cette séquence, permet de se rendre compte du haut pouvoir de migration de ces mêmes cellules in vivo.

Il n'est donc pas étonnant qu'elles se répartissent dans toutes les région du corps de l'embryon, notamment au niveau de la tête où elles conditionnent toute la céphalogenèse des vertébrés.

Ainsi, au cours de l'évolution, les crêtes neurales ont-elles contribué à façonner le crâne et sa musculature. Elles représentent donc un facteur déterminant dans la céphalogenèse des vertébrés et notamment des mammifères, au point que la face de la tête jusqu'à la physionomie humaine résulte de la mise en place et la différenciation des cellules de la crête neurale.

Les cellules de la crête neurale sont la source de multiples dérivés notamment, comme sur cette image, au niveau des arcs branchiaux. Elles contribuent à la formation du squelette branchial et de sa musculature.

Figure 201 : D'après JL. Duband, 2006

D'une manière générale, les cellules de la crête neurale contribuent à des dérivés neuraux (système nerveux périphérique), des dérivés squelettiques (crâne viscéral, Fig.202), des dérivés musculaires (faciaux), des dérivés pigmentaires (chromatophores), des dérivés glandulaires.

Figure 202

Au niveau troncal, on rencontre également les cellules de la crête neurale au niveau des ganglions rachidiens (Fig.203).

Figure 203

Cette particularité des crêtes neurales est caractéristique des vertébrés jusqu'à l'espèce humaine (Fig.204). L'évolution de la céphalogenèse doit beaucoup à cette lignée de cellules.

Figure 204
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