Introduction

Les nombreuses protéines de la cellule doivent être synthétisées et, de plus, ayant pour la plupart une durée de vie limitée (entre quelques minutes et quelques jours), elles doivent être renouvelées en permanence (entretien). Des exceptions existent, puisque certaines protéines de la matrice extracellulaire sont connues pour leur longévité (plusieurs années). Cette synthèse est particulièrement spectaculaire dans les phases de croissance des tissus ou au cours de la cicatrisation (réparation). Dans cette ressource nous traiterons des processus de synthèse (assemblage des acides aminés en chaîne polypeptidique = protéine) et des processus de dégradation intracellulaire, dus respectivement aux ribosomes et aux protéasomes et lysosomes (figure 1a).

Figure 1a. Localisation des processus Informations[1]

Dans le cadre de la synthèse, nous introduirons une autre entité chimique (en plus des lipides, glucides et acides aminés), la chaîne de nucléotides (ADN et ARN). La première partie de cette ressource est consacrée à l'ADN et l'ARN qui sont d'une part, le support d'un message codé (ADN, ARNm et ARNt) qui détermine la nature de la protéine, c'est-à-dire le nombre, l'ordre et l'identité de ses acides aminés, et d'autre part qui participent activement à la synthèse protéique (ARNr des ribosomes).

Figure 4. Du gène à la protéine Informations[2]

ComplémentExcursion : découverte des protéines

Selon l'analyse chimique effectuée en 1835 par Gerrit Mulder à Rotterdam, Pays-Bas, le blanc d'œuf est une substance constituée d'une base (« wortelstof ») de carbone, hydrogène, oxygène et azote, auxquels s'ajoute un peu de phosphore et de soufre. Mulder poursuivit en montrant que des substances d'une composition identique, «eiwitagtige ligchamen », étaient présentes dans des tissus variés, aussi bien animaux que végétaux. Selon ses propres mots : « Si une chose est sûre, c'est que je suis le premier à avoir montré que la viande est présente dans le pain (blé) et le fromage dans l'herbe ». En néerlandais : « dat het vleesch in het brood aanwezig is en de kaas in het gras ». Pour expliquer ces résultats, Mulder avança que toutes ces substances qui ressemblaient au blanc d'oeuf étaient composées de la même « wortelstof » mais avec des quantités variables de phosphore et de soufre. A l'heure actuelle, nous savons que les différences entre les protéines sont dues à leur composition variable en acides aminés.

Figure 28. Gerrit Mulder Informations[3]

En raison de la présence abondante dans les tissus vivants de substances riches en carbone, hydrogène, oxygène et azote, Jöns Jacob Berzelius (à Stockholm, Suède) suggéra en 1838 dans une lettre à Gerrit Mulder, de les nommer « protéines », du Grec « protos » signifiant « premier ». Ainsi, la notion actuelle de protéine était établie : « wortelstof » + phosphore + soufre = protéine. Les idées de Mulder furent adoptées par le célèbre chimiste allemand, Justus von Liebig (Munich, Allemagne) qui écrivit dans son ouvrage « Thierchemie » en 1842, que la nature vivante est composée d'hydrates de carbones, de lipides et de protéines. Une nouvelle branche de la chimie, la biochimie, avait vu le jour. Probablement en raison du lien intime entre découverte des protéines et blanc d'œuf, aussi bien les Néerlandais que les Allemands continuent à nommer « blanc d'œuf » les protéines, c'est-à-dire respectivement « eiwit » et « eiweiss ». Dans un même ordre d'idées, le terme d'albumine (provenant du bas latin « albumen » qui signifie « blanc d'œuf ») a été retenu pour désigner la protéine majeure du plasma sanguin.

Un peu plus tard, aux environs de 1864, Felix Hoppe-Seyler (à Tübingen, Allemagne) prépara les premiers cristaux d'hémoglobine à partir de 20 litres de sang de cheval et détermina leur composition chimique : molécule de 600 carbones environ plus un atome de fer. L'idée émergeait que, par rapport aux autres composants chimiques connus à cette époque, la protéine animale était un édifice chimique extrêmement complexe. La découverte de Hoppe-Seyler révéla que les protéines sont des macromolécules (polymères), concept qui fut difficile à admettre pour ses contemporains chimistes, convaincus que la matière vivante était constituée de petites molécules formant des agrégats colloïdaux .

Justus von Liebig, Thierchemie, 1842

Hoppe-Seyler, F, Ueber die chemischen und optischen Eigenschaften des Blutfarbstoffs. Virchows Arch 29, 233 - 235, 1864