Fonctions des microtubules

Par des exemples spécifiques nous illustrons ci-dessous quelques fonctions des microtubules.

ExempleMouvement des organites le long de microtubules

Les dimères de dynéine et kinésine peuvent être attachés, par leur côté queue, à des structures intracellulaires telles que neurofilaments, filaments intermédiaires, réticulum endoplasmique, Golgi, membrane cytoplasmique, chromosomes (kinétochores) et vésicules de sécrétion. En interagissant coté tête avec les microtubules, ils vont donc permettre le déplacement de ces structures cellulaires.

En rapport avec l'importance du transport le long de l'axone du neurone, les microtubules y sont particulièrement nombreux et durables. Leur stabilité est due à la présence de protéines associées comme MAP2 et Tau. La kinésine assure le transport vers l'extrémité plus du microtubule, c'est-à-dire le transport antérograde (du corps cellulaire vers l'arborisation terminale). Au contraire, la dynéine va assurer le transport vers l'extrémité moins, c'est-à-dire le transport rétrograde ().

ExempleBattements des cils

C'est par la flexion de leur faisceau de microtubules que les cils et flagelles peuvent se mouvoir. A la surface de l'épithélium respiratoire (bronches et trachée) les champs de cils ondulent d'une manière coordonnée, ce qui permet le déplacement unidirectionnel (vers l'extérieur) du mucus bronchique. Le battement est un phénomène actif, suivi d'une phase de récupération passive, au cours de laquelle le cil retourne à sa position initiale. Le mouvement d'un cil est produit par la flexion de sa partie centrale, l'axonème (figure 25 ci-dessous).

Figure 25 - Mouvement des cils et anoxème Informations[1]

L'axonème, est constitué d'une armature de microtubules arrangés en 9 doublets périphériques qui entourent un doublet central. Chaque doublet périphérique est dû à l'assemblage de deux microtubules qui mettent en commun 13 protofilaments.

Dans chaque doublet, un microtubule est associé à la dynéine. La dynéine interagit avec le doublet adjacent pour engendrer un mouvement de glissement d'un doublet sur l'autre (figure 26 ci-dessous). Comme la dynéine cytoplasmique (dans le transport des vésicules), la dynéine ciliaire a un domaine moteur qui hydrolyse l'ATP pour se déplacer le long d'un microtubule vers son extrémité moins.

Figure 26 - Le déplacement simultané des dynéines engendre la flexion du cil Informations[2]

ExempleSéparation des chromosomes pendant la mitose

Les microtubules jouent un rôle essentiel dans la séparation des chromosomes lors de la division cellulaire (la mitose) (). Ils forment une structure très élaborée appelée fuseau mitotique (revoir la figure 21). Cette structure est mise en place pour permettre la séparation des chromatides sœurs (l'ADN hautement condensée), une copie chacune vers les nouvelles cellules filles. Brièvement, après avoir reproduit le centrosome, chacun étant positionné sur des côtés opposés du noyau, trois structures de microtubules sont créés. Les microtubules astraux en contact avec la membrane, les microtubules polaires en contact avec les microtubules du centrosome opposé et les microtubules kinétochoriens connectés avec les chromatides sœurs. Le site de fixation des microtubules aux chromatides est appelé le kinétochore (kineto, mouvement + choros, lieu). Quand tout est bien aligné une structure typique apparaît appelée fuseau mitotique (au moment de la métaphase de la mitose). Afin de tirer appart les chromatides, un complexe annulaire, appelé Dam1, glisse sur les microtubules kinétochoriens vers les pôles opposés de la cellule (événement caractéristique de l'anaphase). Dans le même temps, les microtubules dépolymérisent afin de ne pas entraver le mouvement des chromatides (figure 24c). Une fois séparés, un anneau d'actine « coupe » la cellule en deux cellules filles, un processus appelé cytodiérèse.

Les microtubules du fuseau mitotique Informations[3]
Figure 24c. Le kinétochore en détail Informations[4]

RemarqueLes ATPases mécano-chimiques

Les protéines motrices sont aussi appelées « ATPases mécano-chimiques » car capables de convertir l'énergie libérée par l'hydrolyse de l'ATP (formation d'ADP + Pi) en mouvement moléculaire (et chaleur). Elles utilisent les filaments d'actine et les microtubules (mais jamais des filaments intermédiaires) comme supports (rails) de déplacement.

Les protéines motrices possèdent deux domaines :

  • Un domaine moteur qui en fixant et hydrolysant l'ATP, produit un mouvement. Ce domaine a été hautement conservé au cours de l'évolution.

  • Un domaine de queue variable, capable de lier d'autres protéines motrices (formation de dimères) ou de fixer une charge (organite, vésicule de sécrétion, élément du cytosquelette).

Les trois familles de protéines motrices (myosine-II, kinésine et dynéine) comprennent de nombreux membres.

Comme nous le verrons plus loin, les ribosomes, les ARN- et ADN-polymérases sont aussi capables de mouvements. Ils peuvent donc être considérés comme des protéines mécano-chimiques mais qui sont différentes des ATPases mécano-chimiques précédemment évoquées.

RemarqueLes drogues anticancéreuses ciblent les microtubules des cellules en mitose

Trois types de drogues anti-mitotiques, vinblastine, vincristine et taxol, ont pour cibles les microtubules.

Vinblastine et vincristine sont des alcaloïdes (composants azotés synthétisés par les plantes) extraits de la pervenche de Madagascar (Catharanthus roseus (précédemment nommée Vinca rosea)) (figure 27 ci-dessous). A partir de 1952, cette plante a attiré l'attention des scientifiques pour sa réputation d'anti-diabétique auprès des indigènes de Jamaïque. Les essais démontrèrent effectivement une action inhibitrice très modérée sur la glycémie mais, surtout, mirent en évidence une forte action inhibitrice sur la lignée hématopoïétique dans la moelle rouge des os. Après purification, les substances actives se sont avérées inhiber la formation du fuseau mitotique, bloquant ainsi les mitoses en métaphase. Vincristine et vinblastine se fixent aux dimères de tubuline et empêchent la polymérisation des microtubules. De plus les dimères de tubuline associés avec la vincristine ou la vinblastine forment des agrégats en forme de spirales. La vinblastine est commercialisée sous les noms de Vinblastine SulfateR, VelbR ou VelbanR et est utilisée pour le traitement de la maladie de Hodgkin, le lymphome lymphocytique, le lymphome histiocytique, le cancer testiculaire avancé, le cancer du sein avancé, le sarcome de Kaposi (conséquence fréquente du SIDA (Syndrome d'Immuno Déficience Acquise), et la maladie de Letterer-Siwe. La vincristine, commercialisée sous les appellations Oncovin, Vincasar PES, ou Vincrex, est principalement utilisée pour traiter la leucémie aiguë, le rhabdomyosarcome (muscle strié), le neuroblastome, la maladie de Hodgkin et d'autres lymphomes.

Figure 27 -La pervenche de Madagascar et l'if du Pacifique Informations[5]

Dans le traitement du cancer métastasé du sein, très peu de nouvelles drogues anticancéreuses ont suscité autant d'espoirs que le taxol récemment mis à disposition. Cette drogue, commercialisée sous les noms de PaclitaxelR et TaxotereR est isolée de l'écorce de l'if du Pacifique (Taxus brevifolia) (figure 27 ci-dessus). Le taxol se lie à la tubuline-\(\beta\) en induisant la formation de microtubules très stables. Les cellules sont bloquées en métaphase car la dépolymérisation des microtubules kinétochoriens nécessaire à la séparation des chromosomes est rendue impossible. En outre, la présence de taxol favorise la mort programmée des cellules (apoptose).

Protocole de chimiothérapie

Exemple de protocole de traitement d'un cancer du sein : exérèse de la tumeur primaire, suivie par 6 séances de chimiothérapie (1 par mois) avec Andriamycin (nom générique doxorubicine, inhibiteur de l'ADN polymérase et topo-isomérase II) et Cytoxin (nom générique cyclophosphamide, qui, en établissant des ponts surnuméraires entre les nucléotides de l'ADN empêche l'action de l'ADN polymérase et donc la réplication de l'ADN) puis par 4 séances de chimiothérapie avec Taxol. Ce traitement est complété par 28 séances d'irradiation. Pour réduire au minimum le risque de récidive, une prise quotidienne de Tamoxifen, un antagoniste du récepteur aux œstrogènes, est préconisée pendant 5 ans.